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Le prix de Transfert

Le prix de Transfert
10 avril 2020 Vanessa AKA
In Blog, Comptabilité
COMPTABILITÉ

Le prix de Transfert: une exigence managériale, un risque fiscal, un devoir de compétences pour les entreprises et les professionnels de la comptabilité.

I. LA PROBLEMATIQUE

1. Les prix de transfert ou l’annonce d’une nouvelle menace fiscale. Jusqu’en 2016 ou 2017, la très grande majorité des entreprises, des professionnels de la comptabilité, et même quelques fiscalistes n’avaient probablement pas accordé beaucoup d’attention au prix de transfert. Soit parce que ceux parmi eux qui avaient connaissance des règles de l’OCDE en la matière ou du dispositif fiscal (article17, 18,31, 638, 639 et 667 du code général des impôts du Sénégal) n’ont jamais été confrontés à des vérifications ou redressements associés au prix de transfert. Soit parce que lors de telles interventions les vérificateurs n’ont pas pu ou jugé utile d’étendre leurs travaux à un tel aspect, notamment en raison de l’absence de repères valides sur le sujet, des difficultés à documenter les arguments qu’ils impliquent. A partir de 2018, il est à craindre qu’une telle situation ne soit définitivement révolue, au regard des enjeux budgétaires pour le Trésor public associés aux prix de transfert et des nouvelles dispositions prises à cette fin par l’administration fiscale.

2. Problématique du prix de transfert et critères de détermination. La problématique du prix de transfert est extrêmement vaste, dans bien des cas techniquement complexe, délicate ou sensible. Elle fait depuis la fin des années 80 l’objet d’un débat jamais épuisé, de tentatives de législation, et de conflits toujours renouvelés entre les administrations fiscales et les entreprises internationalement décentralisées et de groupe. Dans la grande majorité des cas, les vérifications portant sur les prix de transfert ont abouti à des redressements fiscaux particulièrement lourds, et pour la plupart inattendus faute de préparation, d’insuffisance de maîtrise du sujet ou de documentation appropriée, et surtout de méconnaissance de la méthode de détermination des prix de transfert appropriés applicables aux entreprises contrôlées. C’est donc sur ce dernier point que se focalise le présent article. Le lecteur intéressé par les considérations fiscales règlementaires et les obligations déclaratives associées au prix de transfert mises en place notamment par l’administration fiscale sénégalaise, prendra connaissance des principes édictés par l’OCDE1 organisme international de référence en matière de prix de transfert d’orientation fiscale et des articles 17 et 638 du code général des impôts 2018 du Sénégal. Cela précisé, il convient de noter que cet article est destiné en priorité aux professionnels de la comptabilité, en cabinet et en entreprises, plus particulièrement ceux qui offrent leurs services aux PME, moins outillés ou peu familiers avec la problématique sous revue. L’intention déclarée d’une telle option, qu’impose par ailleurs l’espace rédactionnel alloué, est de sensibiliser ou de rappeler 1) l’urgente nécessité d’identifier et d’évaluer les enjeux fiscaux et financiers, mais également les opportunités incidentes d’offrir une assistance de qualité lors de vérifications fiscales, ou des services de conseil à haute valeur ajoutée, et 2) de s’assurer qu’ils disposent ou disposeront des compétences et ressources appropriées pour exploiter judicieusement leurs avantages distinctifs, en tant que professionnels spécialisés. On trouvera ci-dessous les deux options, perspectives et caractéristiques qui commandent la détermination des prix de transfert applicables Principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert…2017 (OCDE : Organisation de développement et de coopération économique)


II. OPTION EFFICACITE FISCALE

C’est l’option de l’OCDE et des administrations fiscales affiliées. Les concepts et outils mis en place en matière de prix de transfert par l’OCDE et les administrations fiscales affiliées, constituent un dispositif fiscal coercitif et contraignant fondé sur un contenu économico-financier fluctuant. En décidant d’adopter de tels concepts et outils, les entreprises visent moins la performance managériale et financière que (sinon exclusivement) l’efficacité fiscale : arrêter des prix de transfert conformes aux règles de l’OCDE et du dispositif fiscal et éviter/atténuer les redressements de bénéfices et d’impôt sur les bénéfices.

Le prix de transfert selon l’OCDE et les administrations fiscales associées. C’est l’instrument par lequel ces institutions contrôlent et ajustent, généralement à la hausse et de façon substantielle, les bénéfices réalisés sur les opérations commerciales et financières internationales intra sociétés de groupe et intra entreprises liées ou dépendantes, opérant dans des pays à juridictions fiscales différentes, et par conséquent ajustent les impôts dus y afférents. Au Sénégal, le prix de transfert fait actuellement l’objet des articles susvisés et textes associés, d’inspiration quasi totale du dispositif normatif et du cadre règlementaire de l’OCDE. Ce dispositif est fondé sur le concept de BEPS, acronyme anglais de base érosion and profit shifting, dont la traduction en français est érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices. L’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) font référence aux stratégies d’entreprises qui exploitent les failles et les différences dans les règles fiscales en vue de les transférer dans le pays à imposition plus avantageuse. Le cadre de l’OCDE auquel a adhéré le Sénégal regroupe plus d’une centaine de 100 pays et juridictions qui travaillent en collaboration pour mettre en œuvre les mesures BEPS et lutter contre l’érosion de la base fiscale et les transferts de bénéfices.

Le prix de transfert, autrement connu sous le nom de prix de cession interne, est le prix auquel s’effectuent les échanges internationaux commerciaux, financiers et assimilés de biens, services et actifs corporels et incorporels entre des entreprises installées dans des pays différents qui sont juridiquement, financièrement ou économiquement liées par des liens de dépendance (sociétés mères et filiales, sociétés apparentées, sous contrôle ou influence directs ou indirects, etc.). Les ajustements d’impôt susvisés s’appliquent sur les résultats réalisés sur de tels échanges. Le concept clé qui fonde le dispositif normatif et législatif fiscal du prix de transfert est le principe de pleine concurrence. A ce dernier est associé le concept de prix de pleine concurrence, (PPC) qui constitue le prix de transfert idéal. Dans certaines circonstances, on parlera de juste prix (de transfert) en lieu et place de PPC. En d’autres termes, ce sont les écarts significatifs, constatés lors des vérifications fiscales, entre les prix de cession interne pratiqués par les entreprises dépendantes et ce prix de pleine concurrence (ou juste prix) qui justifient les ajustements et redressements exposés ci-avant. Les ajustements à la hausse des impôts s’appliqueront sur les revenus facturés par l’entreprise vendeuse et à la baisse sur le coût des achats constatés à cet effet par la société acheteuse.

La meilleure approximation du PPC selon l’OCDE est le prix du marché, ou plus précisément le prix comparable sur le marché libre. Le problème réside dans le fait que dans la réalité des entreprises vérifiées, un tel prix n’existe pas toujours, ou n’est pas applicable, tant les contextes, les structures organisationnelles des entreprises concernées et les conditions économico-commerciales et financières qui caractérisent ces échanges sont uniques ou spécifiques. Dans de tels cas, il faut nécessairement recourir à d’autres formes d’approximations du prix de pleine concurrence et convaincre l’administration fiscale de leur validité et de leur bien fondé. Pour l’OCDE et les administrations fiscales associées, les techniques acceptables d’approximation du prix de marché ou du prix comparable ressortent, soit des méthodes traditionnelles fondées sur les transactions (méthodes du prix comparable sur le marché libre, méthode du prix de revente, méthode du prix de revient plus marge), soit des méthodes transactionnelles de bénéfices (méthode du partage du bénéfice, méthode transactionnelle de la marge nette et méthodes par formule de répartition). Ces différentes méthodes sont brièvement rappelées ci-dessous.

Les méthodes traditionnelles fondées sur les transactions: 

1. La méthode du prix comparable (dite méthode de l’opération comparable s’agissant d’actifs incorporels) consiste à comparer le prix de transfert appliqué aux prix qui sont utilisés entre des entreprises comparables indépendantes. Sa représentativité et sa fiabilité sont de premier ordre, à condition que le produit soit identique, que ces entreprises indépendantes effectuent des activités analogues et que l’article soit produit et commercialisé dans des circonstances identiques ou très proches. Dans les situations où ces entreprises comparables opèrent dans des conditions différentes (contractuelles, de taille, de risques commerciaux, conjoncturelles ou de change, etc.), les différences en résultant doivent être évaluées, prises en compte pour déterminer le prix de transfert approprié aux circonstances (en d’autres termes le juste prix comparable).

2. La méthode du prix de revente. Elle s’applique aux opérations faisant intervenir un distributeur lié qui vendra le produit à un prix de vente donné. La méthode, pour établir le prix de transfert, consiste à déduire de ce prix de vente la marge en vigueur entre entreprises indépendantes ayant des activités similaires à celle du distributeur lié.

3. La méthode du prix de revient majoré. Prix de revient s’entendrait ici de la somme des coûts d’achat, de production et de. Le prix de transfert obtenu avec cette méthode est égal à ce prix de revient + une marge bénéficiaire, comparable à celle réalisée par des entreprises indépendantes comparables commercialisant le même produit dans des conditions similaires. Le cas contraire, des ajustements tenant aux différences de conditions devront être identifiées, évaluées et prix en compte dans la détermination de la marge. Enfin, il convient de noter que dans cette méthode les particularités ou spécificités propres aux produits sont rarement pris en compte et une incertitude peut résider dans ce que recouvre le concept de marge. Ne grande précaution est requise sur ce point. Si, et seulement si, aucune de ces méthodes ou leur combinaison ne permet d’obtenir un prix de transfert suffisamment fiable ou satisfaisant pour l’administration fiscale et les entreprises concernées, les parties doivent envisager d’examiner les méthodes transactionnelles de bénéfices suivantes.

Les méthodes transactionnelles de bénéfices:

4. La méthode de partage du bénéfice. Elle consiste à répartir la marge globale réalisée par le groupe, sur un produit vendu aux tiers, entre toutes les sociétés qui interviennent sur le produit, en fonction de leur contribution dans sa conception et sa commercialisation. Cette répartition s’effectue sur la base d’une analyse fonctionnelle (les rôles dans la conception, la recherche, la production, la commercialisation, le financement, les risques pris, etc.). On rencontre plus particulièrement dans les groupes très intégrés. Elle peut s’avérer très complexe, tant au niveau de la détermination de la marge ou bénéfice brut à répartir que de sa répartition (concepts à clarifier au cas par cas), complexité qui peut requérir de faire appel à certaines formes alternatives de répartition, comme celle du fractionnement des bénéfices résiduels et celle de l’analyse des contributions de l’OCDE. Laplace rédactionnelle allouée ne permet pas de les aborder.

5. La méthode transactionnelle de la marge nette. Elle repose sur la comparaison, sur une période pertinente en durée, de la marge nette réalisée au sein du groupe avec celles d’entreprises indépendantes ayant effectué des transactions comparables. Dès lors, le prix de transfert est établi sur base des écarts constatés, et la marge à prendre en compte est ajustée s’il y a lieu, si de tels écarts sont significatifs.

6. Méthode par formule de répartition. Elle consiste à répartir le bénéfice global du groupe sur la base d’une clé de répartition rationnellement justifiée et arrêtée par le centre de décision du groupe (ex: chiffres d’affaires, actif immobilisé, effectif en personnel, etc.). Une telle méthode n’agrée pas toujours les administrations fiscales affiliées à l’OCDE (sont-elles représentatives des réalités économiques ou des marchés des entreprises considérées? Sont-elles équitables par rapport aux bases de taxation des entreprises indépendantes? ).


III. OPTION EFFICACITE MANAGERIALE ET ORGANISATIONNELLE

La détermination des prix de transfert est tout autant dépendante d’options managériales et comptables que fiscales. Une telle assertion tient précisément aux options, exigences et contraintes de management interne des entités constitutives des groupes (ex: objectifs et évaluation des performances de chaque entité), qu’aux stratégies de positionnement commercial et de maximisation du résultat du groupe. Une telle considération commandera en priorité le choix de l’une ou l’autre méthode internes décrite ci-dessous.

La première raison qui conduit le centre de décision d’un groupe (ex: direction de la société mère) à garder le contrôle sur les prix de transfert applicables au sein du groupe, outre la maximisation du profit de groupe, tient au souci de laisser une certaine autonomie de gestion aux entreprises du groupe et permettre à leurs dirigeants d’atteindre leurs objectifs commerciaux et financiers, et d’assumer leurs responsabilités. Cela est pratiquement toujours le cas quand celles-ci sont des centres de profit ou des centres d’investissements auxquels sont assignés des objectifs de rentabilité et de rendement. D’ailleurs la problématique du prix de transfert ne se pose jamais quand de telles entreprises n’ont pas de telles qualités ou sont des centres de coût. L’autre raison tient concomitamment aux politiques de consolidation et de valorisation (financière ou boursière) des titres du groupe. L’optimisation fiscale de l’impôt global du groupe est dès lors autant une conséquence qu’une cause. Par conséquent, Les méthodes internes de détermination des prix de transfert dans une option managériale, résultent moins du souci d’obtenir des approximations du prix de pleine concurrence ou du juste prix que des décisions stratégiques, structurelles et organisationnelles qui caractérisent le groupe. Les cinq plus populaires sont la méthode du prix du marché, la méthode des coûts variables (avec ou sans ajout du coût d’opportunité), la méthode cost plus (coût d’achat ou de production + marge), la méthode des prix négociés et la méthode duale (méthode à double prix).

1. La méthode du prix de marché. Elle correspond à celle du prix comparable. Il reste toutefois que son application est conditionnelle: ce prix doit résulter de conditions normales de concurrence, de l’offre et de la demande et le marché n’est pas contrôlé par quelques grosses entreprises.

2. La méthode des coûts variables (majorés ou non des coûts d’opportunité). Cette méthode est appliquée par les entreprises qui produisent des biens et services pour les vendre pour l’essentiel aux autres entreprises du groupe. Elle est toujours utilisée en considération du niveau de la capacité de production de l’entreprise vendeuse et des directives du centre de décisions du groupe. Dans sa version hors coûts d’opportunité, le prix de transfert est alors égal à la somme des coûts variables de production encourus par l’entreprise vendeuse pour produire les bien et services concernés. Quand il y a excédent de capacité, l’application de cette méthode conduit à retenir un prix de transfert égal au coût marginal qui aboutit à un bénéfice nul pour l’entreprise vendeuse. Une telle situation peut s’envisager quand l’entreprise acheteuse ou le groupe peinent à vendre leurs produits, sont confrontés à des difficultés financières et veulent rendre attractifs leurs prix en les réduisant. En l’absence d’excédent de capacité, retenir les seuls coûts variables comme prix de transfert peut être une option si l’entreprise vendeuse n’a d’autre marché que les entreprises du groupe. Dans le cas contraire (existence de possibilité de vente à des entreprises avec lesquelles elle n’a aucun lien), unetelle option aboutirait à renoncer à une marge qui servirait à couvrir les coûts fixes et à générer du profit. Avec l’ajout des coûts d’opportunité, le prix de transfert n’est plus dépendant du niveau de capacité. En outre il améliore la représentativité du cout encouru pour l’entreprise acheteuse (la charge de l’achat est plus proche de sa valeur économique et le prix de transfert est exclusivement composé des seuls coûts pertinents à la vente pour l’une et à l’achat pour l’autre). Un coût d’opportunité, rappelons-le, est un coût encouru, lors d’une prise décision, pour avoir porté son choix sur l’option A en lieu et place des options B ou C, etc. On l’appelle également coût de renoncement. Quand il est possible de déterminer les coûts d’opportunité (ce qui n’est pas une situation fréquente, ni une opération facile notamment quand l’entreprise fabrique plusieurs produits), la méthode «coûts variables + coûts d’opportunité» peut être une approximation valable du prix de marché, donc du prix de pleine concurrence dans les circonstances sous revue. Quel que soit le cas, l’adoption de cette méthode, pour être considérée ou acceptable par l’administration fiscale, requiert d’être sérieusement justifiée et comprise par cette dernière, notamment en termes de processus opérationnel, comptable, économique et financier.

3. La méthode du coût complet plus marge. Elle correspond à celle du prix de revient majoré exposé ci- dessus, coûts de distribution en moins. Le prix de transfert (PT) pratiqué est donné par la formule de base PT = coûts variables de production + coûts fixes de production + marge. Cette méthode est des plus populaires, notamment en raison du fait qu’elle est familière à la plupart des entreprises de production et des professionnels comptables. De façon générale, elle est, en général, plus ou moins relativement facile à établir, estimer. Soit parce que l’entreprise dispose d’une comptabilité /d’un suivi analytique de ses coûts, soit parce qu’il est possible de collecter l’information requise à partir des écritures et grands livres comptables. Elle peut constituer une approximation d’un prix de pleine concurrence ou d’un juste prix. Cette méthode comporte toutefois des défauts qui peuvent être plus ou moins accentués ou négativement déterminants, et entacher sa représentativité. Ils tiennent pour l’essentiel au bien fondé ou non des critères de variabilité, à la justification des coûts fixes affectés ou imputés, aux méthodes d’évaluation des stocks (initial, final et en cours), aux inefficacités organisationnelles de l’entreprise vendeuses ou du groupe, et à la validité de la justification de la marge (Sur coût complet? Sur coûts variables ou sur coûts directs?). Une solution qui permet d’atténuer de telles imperfections consiste à utiliser un coût complet standard et une marge standard, ce qui requiert d’en avoir les compétences et capacités organisationnelles. Une variante plus élaborée et plus représentative consiste à utiliser les données de la comptabilité ABC.

4. La méthode des prix négociés. Cette méthode qui consiste, sous le contrôle du centre de décision du groupe, pour l’entreprise vendeuse et l’entreprise acheteuse à s’entendre sur le prix de transfert applicable, en l’absence ou non d’un prix de marché, quand les deux entreprises ont une autonomie de gestion, ont une correcte ou commune appréciation des prix du marché ou d’un marché équivalent, et acceptent en cas de désaccord la décision arbitrale du centre de décision (ex: société mère). Le meilleur contexte d’utilisation de cette méthode est toutefois celui de l’inexistence d’un marché de référence. Le prix de transfert négocié se situera à l’intérieur de l’intervalle fermé constitué par le total des coûts variables et le prix de marché. Deux approches sont envisageables: partir du prix de marché et l’amputer des divers éléments non pertinents qui y sont inclus (frais de commercialisation, de transport, etc.) ou partir des coûts variables et y ajouter certains coûts indirects de production ou frais généraux, et une marge.

5. La méthode du double prix. Cette méthode qui habituellement relève aussi d’une décision du centre de décision du groupe s’effectue comme suit : l’entreprise vendeuse du produit ou du service facture aux tiers le prix de marché ou son équivalent, et à l’entreprise acheteuse du groupe elle facture un prix de transfert égal au coût variable ajusté ou non, au coût complet ou à un autre coût interne. C’est lors de la consolidation que les régularisations et éliminations seront effectuées et le profit réel du groupe établi. Dans cette méthode qui s’apparente à celle du coût variable + coûts d’opportunité, les deux entreprises réalisent du profit, outre qu’elle permet d’éviter les conflits de résultat entre les dirigeants des deux entreprises. La différence entre le profit global consolidé et la somme des profits individuels est à considérer comme le coût d’opportunité pour le groupe d’avoir « obligé » les deux entreprises à faire affaire entre elles.

 


IV. LES EXIGENCES DE COMPETENCES

Elles résultent, non seulement du contenu organisationnel, fonctionnel et financier des obligations déclaratives (non abordées ici) et des impératifs liés, lors d’une vérification fiscale, à la nécessité de présenter des arguments techniques fondés et justifiés quant à la validité des prix de transfert appliqués. Mais elles tiennent surtout dans la complexité des méthodes exposées et dans les faiblesses, insuffisances ou inexpériences de la grande majorité des professionnels de la comptabilité qu’ils soient en cabinets ou en entreprises, en matière de comptabilité analytique et de management des coûts opérationnels, sur base desquels seront établis les prix de transfert fiscaux ou managériaux. Les professionnels qui seront impliqués ou désirent l’être dans l’assistance aux entreprises vérifiées ou leur offrir des services de conseil, sont dans l’obligation professionnelle et éthique de recenser au préalable leurs besoins et faiblesses, et de prendre à temps les mesures correctives ou conservatoires qui s’imposent. Sans entrer dans les détails.

1. Inventaires des faiblesses. Il s’agit d’établir dans quelles mesures les compétences et expériences requises, à défaut les ressources alternatives, existent en matière de maîtrise adéquate des principes de l’OCDE, des concepts et techniques d’élaboration des différents prix de transfert, ainsi que d’identification de ceux applicables dans le contexte des entreprises assistées ou conseillées. Un exemple notoire des faiblesses ou inexpériences susvisées, réside dans les difficultés structurelles rencontrées dans la détermination des coûts pertinents, (variables, fixes, de production, d’opportunité, etc.). Dans un tel ordre d’esprit, ni les seules indications du Syscohada (fort incomplet sur le sujet), ni les réminiscences des cours de comptabilité analytique suivis, moins encore la comptabilisation analytique des opérations pour les entreprises disposant de logiciels offrant une telle faculté, ne seront suffisantes. Une connaissance poussée des différentes modèles de détermination des coûts précités, associée à des capacités d’analyse des processus de production, de cheminement et de comportement des coûts de produit et de période, seront invariablement nécessaires.

2. Mesures conservatoires. La première devrait consister à s’imprégner du dispositif de l’OCDE et des dispositions fiscales. Mêmes si certaines règles ou obligations ne s’appliquent à tous les contextes impliquant un prix de transfert, leur connaissance constitue une source d’efficacité et un avantage comparatif. La seconde tient à la nécessité d’assurer une formation ou une mise à jour des connaissances et expériences en matière de d’analyse, de modélisation et de détermination des coûts, à destination des responsables comptables et financiers, des experts et collaborateurs qui seront chargés d’apporter leur concours aux entreprises déjà clientes ou non. Cela sera d’autant plus une urgence quand l’entreprise appartient à la catégorie des PME filiales de sociétés étrangères ayant ou non un statut d’EFE, fatalement candidates désignées à de telles vérifications. A de rares exceptions, dans la très grande majorité de ce type d’entreprises, ni le statut juridique de filiale (généralement suarl ou sau), ni le mode de gestion (encadrement plus technique que managérial), ni les modalités de production (agricole, pêche, distribution, etc.), ni le financement, moins encore les échanges commerciaux avec les sociétés mères, la priorité est loin de porter sur cette problématique de coûts, donc de prix de transfert. D’où leur extrême vulnérabilité.


V. CONCLUSION

En conclusion, il convient en premier lieu de retenir qu’en matière de prix de transfert les variables déterminantes pour les traiter efficacement et trouver des solutions consensuelles avec les administrations fiscales sont au nombre de quatre : la connaissance du dispositif fiscal applicable, l’existence d’un prix comparable ou d’une correcte approximation, le contexte commercial et les caractéristiques managériales et organisationnelles des entreprises concernées et les compétences appropriées en la matière des professionnels comptables (et fiscalistes) impliqués, chargés d’assister ou de conseiller ces dernières.

En second lieu, et cela est valable autant pour les entreprises que pour l’administration fiscale, il n’existe pas, ou alors très rarement, de prix de transfert qui satisfassent les parties, les intérêts et enjeux étant souvent contradictoires ou ne reposant pas sur des préoccupations partagées (ajuster un résultat fiscal jugé minoré c/ maximiser le rendement des investissements).

Que les prétentions de l’administration fiscale se révèlent infondées, que les relations deviennent conflictuelles et aboutissent devant le juge (cas qui n’offre pas toujours un meilleur coût d’opportunité pour l’entreprise), ou qu’un compromis ou un accord consensuel soit retenus par les parties, il est fort peu probable que l’entreprise assisté par un professionnel de la comptabilité qu’un tel compromis ou accord consensuel soit véritable à l’avantage de cette dernier si ce professionnel n’a pas satisfait aux exigences de compétences brièvement rappelées ci-dessus.

De Paul KHOURY – Expert Comptable Membre de l’ONECCA

Pour plus d’informations sur la problématique du prix de Transfert. Veuillez lire notre livre https://tedmaster.org/produit/je-suis-comptable/

En effet, cet article est tiré du livre Je Suis Comptable

Je suis Comptable

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